"Relire tes cours de la journée et faire les devoirs que tu as pour les six mois à venir serait une bien meilleure idée que de rester planté là avec cet air godiche sur le visage", répondit Sylvia de son habituelle voix sèche.

Sèche, mais avec un sourire sur le visage. Chose qu'elle n'accordait qu'aux personnes qu'elle pouvait réellement qualifier d'amis. Autant dire qu'elle pouvait largement compter ces personnes sur les doigts de la main.

Sylvia Stender avait passé une journée tout ce qu'il y avait de plus normale : un réveil tôt le matin pour relire les manuels des cours qu'elle aurait dans la journée, une visite de courtoisie à Mme Pince pour lui emprunter douze livres - et pas un de plus ! la vieille chouette lui aurait tapé sur les doigts, un petit déjeuner avalé entre deux pages de bouquin, et un enchaînement de cours tous aussi intéressants qu'inutiles : Sylvia Stender savait déjà tout. Après le dîner, Sylvia avait rapporté ses douze livre quotidiens - elle avait manqué de temps pour le faire plus tôt, et s'était décidé à se promener une dernière fois dans le château avant le couvre-feu.

Descendant le grand escalier de marbre qui menait au hall, Sylvia avait entendu Alex lui parler. Soit elle faisait trop de bruit, soit il avait décidé de se faire greffer des yeux invisibles derrière la tête. Une chose totalement stupide dont Alex pouvait très bien avoir besoin. Après tout, deux yeux ne suffisaient pas à tout le monde pour ne rien louper de quoique ce soit.

Sylvia continua sa descente, et vint se placer près de son amie : debout. De cette façon, elle le regardait encore plus haut que jamais...

"De toute façon, il n'y a absolument rien d'autre à faire dans ce château", dit-elle avec une pointe de regret à peine perceptible.

Depuis quelques mois, Sylvia Stender s'ennuyait à Poudlard. Elle aimait toujours autant lire, faire respecter le règlement et montrer à quiconque le voulait qu'elle était de loin la sorcière la plus brillante que la Terre ai jamais portée. Mais Poudlard était devenu bien calme ces temps-ci. Plus de réunion pour le Risèd Squad. Plus personne qui n'osait défier Saya Serpentard... tout ça était finalement bien triste. À croire que Saya avait gagné...

Ayant donc parlé pour lui-même plus que pour Sylvia, Alex sursauta brusquement lorsque la blondinette lui adressa la parole. Une bombe intérieur vint exploser dans l'estomac du Gryffondor. Ses mots furent pris comme elle voulait les faire comprendre, à savoir: avec une touche d'ironie qu'elle n'accordait qu'à très peu de gens. Alex en était même touché. Au mot godiche d'ailleurs, il fut amusé. Tellement qu'il ne put s'empêcher de laisser échapper un petit rire discret semblable à un gloussement. Il avait toujours la tête sur la paume de ses mains, mais il fit fonctionner son cou pour regarder Sylvia de trois-quart arrière et les yeux levés vers elle. Lorsqu'il croisa son regard, il fut comme hypnotisé l'espace d'un instant. Son regard inspirant l'autorité, ses cheveux bouclés tombants sur ses épaules, dans un flou totale autour de lui ; tout ceci le rendait nostalgique.

"Eh bien, la voilà donc? J'aurais juré que plus personne n'était dans ce hall..." Pensa-t-il avec la joie de revoir son amie qu'il n'avait pas vu depuis si longtemps.

Très content de la voir se tenir près lui, et ne cherchant manifestement plus à le fuir, Alex fut aux anges. Si ravi d'ailleurs, qu'il ne voulais pas lui laisser rétorquer avant de poursuivre, mais lorsqu'il entendit le ton quelque peu désolé de la blondinette qui occupait une place si grande dans son petit cœur, il ressentit un pincement à ce dernier. Il commençait à se poser toutes sortes de questions. Du genre ce qu'il pouvait bien la mettre en pareil état? Bien qu'il le savait très bien. Lui aussi était passé par une période d'ennui à mourir. Il n'avait fait que se promener seul dans le château... Les seuls fois où il était sortis, furent les fois où de jeunes élèves lui avaient demandé de leur parler du Risèd Squad. Alex s'était engagé dans cette requête avec les meilleurs attentions du monde, mais cela avait semblé être trop pointu pour de jeunes recrues. Il avait donc abandonné tout espoir quant aux nouvelles têtes dans son club.

C'est pourquoi, il comprenait très bien l'état désolé de son amie, vu que lui-même passait par des moments pareils ces derniers temps. L'agacement de voir les élèves arriver, puis se faire ramener à la maison par des parents ayant eut vent des agissement de Saya...

"Ouais, 'fin, quand ils sauront ce qu'ils veulent aussi ceux-là..." pensa-t-il une fois encore.

Un petit laps de temps s'était écoulé depuis que Sylvia eut répondu à son ami. Alex d'ailleurs ne voulait pas paraitre grossier envers la Serdaigle, aussi il lui répondit avec le même petit sourire que celui qu'elle lui eut lancé en se moquant gentiment de lui:

-Mais voyons Sylvia, tout ceci est déjà fait. Lui assura-t-il avec douceur. Mais pour l'air godiche, là , il y aurait beaucoup trop de boulot pour réussir à quelque chose de convenable. Ajouta-t-il l'air amusé dans l'espoir de faire à nouveau sourire son amie.

Il pesa très soigneusement les mots que Sylvia avait ajouté lors de sa première réponse. Les mots de la blondinette ne se voulaient pas blessants, mais ils mirent Alex mal à l'aise. Il était bien vrai que de voir le château si triste et désolé, rendait beaucoup d'élèves tristes. C'était comme si la magie avait quitté ces lieux. Alex y pensa attentivement et laissa échapper une réponse, plus pour lui que pour Sylvia, comme une pensée exprimée à haute voix:

-Je crois que le professeur Dumbledore lui-même serait à faire les cents pas dans son bureau s'il était encore là.

Bien sûr, il faisait référence à Saya en ce moment. Certes, Alex ne connaissait rien de l'histoire de Poudlard qui ne fut pas reporté dans les livres qu'il avait eu le loisir de lire durant sa scolarité. Tous ce qu'il savait des évènements passés, il le devait à son frère ainé qui était à Poudlard, bien des années avant les jumeaux. Leur grand frère à tous les deux n'avait pas connu, lui non plus, ces évènements ; mais la disparition du professeur Dumbledore était si proche à cette époque, que tous les élèves en parlaient encore, ainsi que nombre de professeurs. Des anciens ayant même participé aux combats contre Lord Voldemort, avaient rapporté leurs faits-d'arme aux discussions dans la coure d'entrée. Alex et Xela avaient donc été plus ou moins briffés sur les conditions de vie à Poudlard. Il invita la blondinette à s'assoir à côté de lui d'un signe de tête désignant sa propre épaule.

-Toi aussi tu te sens un peu...comme perdue...en ce moment? Demanda-t-il avec complicité, sincérité et une certaine gravité à son amie. Voyant que son morale n'était pas au mieux, il voulais lui donner un coup de pouce pour le lui remonter.

Les paroles de Sylvia semblèrent bien compliquées si l'on en croyait le temps de réponse d'Alex. Evidemment, entre son frère et les Gryffondors de sa maison, il n'avait pas bien l'habitude d'entendre de belles phrases formées de mots de plus de deux syllabes ! Sylvia attendit cependant patiemment. Et son ami répondit qu'il avait déjà tout fait. Ce à quoi Sylvia répondit par une moue dubitative.

"Bien... alors tu pourrais toujours relire tes manuels de cours pour préparer les leçons de demain" proposa Sylvia, un large sourire crispé sur le visage.

Oui, Sylvia Stender était certaine qu'il ne le ferait pas. D'ailleurs, elle était bien la seule à le faire tous les matins, même parmi les Serdaigles ! Et pourtant, cela semblait un exercice tellement banal. Quoi de plus quotidien que de relire son manuel pour ne rien oublier ? Rien. Absolument rien de plus naturel.

Alex invita Sylvia à s'asseoir, ce qu'elle fit presque aussitôt. Après tout, elle avait bien marché aujourd'hui pour jongler entre ses nombreux cours, et ses jambes commençaient à se fatiguer. Le jeune Gryffondor avait mentionné Albus Dumbledore. Sylvia avait haussé les épaules en signe d'approbation, mais n'avait rien ajouté. Cela était vrai : l'ancien directeur de l'école serait certainement en train de faire les cents pas. C'était peut-être également le cas des professeurs actuels de Poudlard d'ailleurs. Tous ces élèves allant et venant à cause de Saya Serpentard... cela devait les mettre dans des états pas possibles. Et c'était compréhensible après tout.

Sylvia fut arraché de ses rêveries par Alex. D'une façon absolument très gentille, il lui demanda si elle aussi était perdue, ces temps-ci. Sylvia se redressa raide comme une baguette magique sur les marches de l'escalier. Un sourire plat sur le visage, elle tourna mécaniquement sa tête vers le Gryffondor :

"Perdue ? Je ne suis jamais perdu, Alex" répondit-elle avec sécheresse. "Et... je suis désolée que tu le sois", ajouta-t-elle en se radoucissant légèrement.

Ces temps-ci, Sylvia n'était pas au mieux de sa forme. Elle n'avait plus énormément d'élèves à réprimander - forcément, ils partaient tous ! - et toutes les recherches sur la salle du Risèd semblaient au point mort. Cela lui faisait tellement penser à la fermeture de l'école... un coup dur pour Sylvia. S'il y avait une chose à laquelle elle tenait réellement, c'était l'école. C'était son échappatoire à tous les soucis qu'elle pouvait avoir. C'était également le lieu où elle s'était fait ses premiers amis. Et c'était aussi ici qu'elle s'était forgé un caractère bien trempé.

Heureusement, l'école avait rouvert. Mais tant de personnes étaient parties. Avaient lâchées l'école. Avaient lâchées toutes les recherches sur Saya ! Tout ça était d'une lâcheté sans faille, et Sylvia en voulait encore à certains... mais la réouverture et la mise en place de nouvelles réunions du Risèd Squad l'avait éloignée de toutes ses mauvaises pensées.

Mais aujourd'hui, tout cela revenait en masse. Comme si l'histoire allait se répéter, encore et toujours...

"On ne peut pas se perdre lorsque l'on ne sait pas où l'on va..." dit-elle plus pour elle-même que pour Alex.

Alex était, malheureusement pour Sylvia, bien plus attentif à ce qu'elle disait qu'il ne devait l'être en cours de potion. Oui, Sylvia l'avait dit : on n'est jamais perdu lorsque l'on ne sait pas où l'on va. Et quoi de plus vrai ? D'ailleurs, Sylvia Stender disait-elle parfois quelque chose qui n'était pas vrai ? Non. Bien sûr que non.

Sylvia soupira après la question du Gryffondor. Après tout, à quoi bon s'évertuer à dire que tout allait bien quand il était grand temps de se remuer, mh ? Mais avant, il fallait tirer quelques petites choses au clair.

"Oui, Alex, ça va. J'ai toujours des Optimal dans toutes les matières, je suis toujours la sorcière la plus talentueuse de l'école, et non je ne suis pas malade. Pas de fièvre, pas de rhume, pas de jambe cassée," dit-elle d'une traite, un sourire figé, plat, et calme, sur le visage. "Mais il faut ouvrir les yeux, même si ce n'est agréable pour personne. Tout va de travers à Poudlard ces derniers temps. Saya Serpentard règne en maître, et tous les élèves qui se retrouvent confrontés à elle décident de se murer dans le plus grand des silences."

Sylvia marqua une pause. Elle parlait assez rapidement, avec beaucoup d'énergie.

"Alors oui, je vais bien. Mais Poudlard va mal."

L'école allait mal. Et cela la rendait malade. Poudlard, ce haut lieu d'enseignement était tout ce qu'il restait à Sylvia. Ou presque. Elle avait ses amis, son père... sa mère aussi. Mais surtout, Poudlard était son seul refuge. Sylvia se leva, descendit les deux dernières marches restantes, et fit quelques pas rapides devant son ami, pensive. Puis elle se tourna de nouveau vers lui.

"Alex, Poudlard fait partie de moi. Et si Poudlard va mal... alors j'ai besoin de faire quelque chose pour que la maladie cesse de se propager. Rester sans rien faire, c'est comme... c'est comme savoir que l'on va perdre son bras, et ne rien faire pour tenter de le garder."

Sylvia marqua une nouvelle pause. Elle était très sérieuse. Et de plus en plus agitée.

"Alex..." répéta-t-elle à nouveau. "Il faut faire quelque chose. Tu entends ? Poudlard va fermer si nous ne faisons rien. Encore. Toujours. Et on va perdre des gens. Encore. Toujours. Tu comprends, Alex ?

Sylvia fit de nouveau les cents pas. Pourquoi n'y avait-il personne dans ce hall ? Et pourquoi les couloirs étaient si calmes ? Les élèves étaient toujours bruyants habituellement. Il y avait toujours un idiot de Serpentard pour faire une farce ou deux un quelqu'un qui n'avait rien demandé. Et puis de stupides Gryffondors qui cherchaient à courir dans les couloirs après le couvre-feu...

Face à la réaction pour le moins excessive, mais juste de son amie, Alex lui lança un léger sourire en coin. Le genre de sourire qu'il donnait sans s'en rendre compte, mais qui était signe d'une victoire sur les évènements. Il n'avais pas fait exprès de provoquer la Serdaigle, mais il était ravi de voir ce résultat. En fait, il ne savait pas comment aborder le problème de "il faut relancer ce qui dort". Voir que Sylvia faisait les premiers pas, ça le réconfortait et lui donnait une vague de combativité. Pour résumer, il aimait que son entourage proche lui montre l'intérêt qu'ils avaient de se battre. Sylvia se montrant ainsi était donc une très bonne chose. Alex se leva à son tour pour se placer très près de son amie et lui dit sur un ton qui se voulait compatissant:

-C'était justement ce que je voulais te dire Sylvia. Je me sens perdu par rapport à tous ce qu'il se passe en ce moment à Poudlard. Je sais que cette école compte pour toi, elle compte tout autant pour moi tu sais. C'est un endroit que j'aime et où j'y ai des amis. Très peu d'ailleurs, mais passons... je veux que l'on recommence ce que nous avions tenté de mettre en place. Je veux que nous nous remettions au combat, seulement...je n'sais pas par où commencer...

Oui, malgré son désir de vouloir se battre, Alex ne savait plus du tout quelle approche il fallait tenter avec cette capricieuse Saya et sa salle maudite. Il aurai volontiers entreprit des recherches approfondies sur l'objet ayant un rapport avec l'hypothétique fin de la salle. Il savait ce qu'il devait faire, il savait qu'il devait retrouver quelque chose, mais n'ayant plus eu aucune nouvelles des autres membres du club, il ne savait pas où ils en étaient. D'ailleurs, à cette pensé, une question vint le perturber...

"Devrais-je le dissoudre une fois de plus ce club? Après tout, on n'y apprend pas grand chose...enfin si, mais il n'y a toujours que les mêmes qui apportent leur soutient...boaf, j'sais pas trop..."

Alex revint au moment présent pour voir Sylvia un peu angoissée. Il aurait été bon pour elle qu'il lui soit proche, mais être trop proche d'elle l'aurait peut-être fait fuir plus qu'autre chose. Il se ravisa donc d'être trop attentionné envers la Serdaigle. Cela dit, il s'approcha un peu plus près de Sylvia et il la regarda droit dans les yeux en lui demandant d'un ton très grave et très sincère:

-Par quoi veux-tu que l'on commence? Moi, ça ne me dérange pas de violer une demie douzaine de règlements de l'école s'il le faut. Je peux me risquer à beaucoup pour Poudlard et pour t...

Et voilà, ses sentiments pour la jeune fille reprenaient le dessus. Il était tantôt passé par un long moment de doutes pour savoir si oui ou non il était amoureux de Sylvia Stender... mais après y avoir beaucoup réfléchi, Alex s'était dit qu'il ne voyait en elle qu'une amie qu'il considérait comme une sœur. Là il était confus dans ses sentiments. Il se posait la question si oui on non il...

-Ah mais c'est pas vrai?! Dit-il à haute voix comme l'agacement d'un insecte que l'on chasse et qui persiste à vous ennuyer...Sylvia, la "capricieuse" recommence...J'ai de nouveau des...des doutes... enfin plus que d'habitude, euh tu vois, ma peur quoi... Raaah, mais elle nous laissera donc aucun moment de répit celle là?!!!

Oui, Alex perdait légèrement son sang froid. Il n'était plus abattu, mais agacé. Certes pas contre Sylvia, mais contre Saya... Il fallait mettre un terme à tout ça, il fallait qu'ils recommencent à se battre, il leur fallait surtout les idées claires et un plan à suivre. Reprendre là où ils s'étaient arrêtés pour évaluer chaque point avec réalisme et crédulité.

-Pardon Sylvia, mais c'est énervant de voir Poudlard dépérir avec des gens qui semblent n'en avoir rien à faire et la "Miss" qui joue avec nous...on a l'impression de ne plus être nous-même quand elle s'attaque à nous...

Il venait de s'excuser et dans son esprit, il avait raison de le faire. Il s'était emporté et devait des explications à son amie. Il ne voulait pas qu'elle croit qu'il puisse en avoir après elle...

Faisant les cents pas, Sylvia devait avoir l'air extrêmement agité d'un oeil extérieur. Mais c'est seulement lorsque Alex lui répondit de façon plutôt posée que Sylvia s'en rendit compte. S'arrêtant net aux premiers mots d'Alex, elle se sentit mal d'avoir ainsi perdu le contrôle d'elle-même. Chose qui ne lui arrivait jamais. Ni en recevant une mauvaise note - elle n'avait que des Optimal - ni en récoltant une punition - elle était l'élève parfaite et n'en avait jamais - ni lorsqu'un élève lui répondait ou lui riait au nez - elle avait plus d'autorité et de sang froid qu'eux, en règle générale.

Perdre pied lui était ainsi rarement arrivé. Elle se souvenait seulement de deux instants, qui lui faisaient étrangement penser à celui-ci. Deux fois dans sa scolarité à Poudlard, elle avait eu l'impression d'avoir été une autre, pendant quelques minutes. Ce soir-là, où la lune était devenu si attractive qu'elle avait foncé droit dans le deuxième lac, causé par l'inondation du parc. Elle avait presque terminée noyée. Et puis cette journée-là, où elle s'en était vivement pris à un élève, le pointant de sa baguette magique en croyant qu'il s'agissait de Saya Serpentard.

À cette pensée, un noeud se fit dans son estomac. Elle l'avait menacé. Elle était devenue presque folle à lier. Tout ça à cause du doute. La peur matérialisée - si l'on pouvait le dire ainsi - d'Alex. C'était ce jour-là, alors qu'elle expérimentait le doute d'une façon aussi forte pour la première fois de sa vie, que tout avait basculé. Elle avait caché des faits au professeur Wulfric. Et avait même prévu de passer outre le règlement de l'école pour s'entraîner sur un épouvantard...

Sylvia déglutit avec difficulté. Ces souvenirs étaient bien trop douloureux.

Une nouvelle fois, c'est la voix de Alex qui lui permit de sortir de ses pensées. Elle tourna vivement la tête vers lui, changeant radicalement de visage. Plus une trace de doute, de tristesse ou même de colère - toutes les expressions par lesquelles elle venait de passer. Elle arborait un large sourire crispé : celui que Sylvia était capable d'afficher en toute circonstance. Une pointe de supériorité. Le tout agrémenté d'un air hautain.

"Par le diadème de Rowena Serdaigle ! Que ferais-tu sans moi, Alex ?" dit-elle en levant les yeux au ciel. "On reforme le club. Et pas en trouvant de nouveaux élèves qui s'enfuiront à toute jambe dès qu'on leur aura expliqué qu'il ne s'agit pas de jouer à l'apprenti sorcier. On retrouve les anciens. Même si pour cela il faut convaincre leurs parents de les laisser revenir" ajouta-t-elle d'un ton ferme et décidé. "Et ensuite, nous recruterons. Mais de façon stricte."

Alex sembla à son tour pris d'un doute étrange. Apparemment, elle n'était pas la seule à combattre Saya Serpentard ce soir. Rien d'étonnant à cela : c'était la peur d'Alex après tout. Celui-ci s'emporta contre l'héritière de Serpentard, avant de faire ses excuses à Sylvia. Un sourire amusé se dessina au coin de ses lèvres.

"La nuit, le château se montre souvent hostile depuis que la salle du Risèd a été rouverte. Respire, et reprends tes esprits" dit-elle d'un voix teinté de gentillesse et de fermeté.

En effet, comme vous pouvez le voir, le château faisait bien des siennes en ce soir glacé à Poudlard. Alex était enclin à douter, c'était dans sa nature et sa seule plus grande peur. Pour lui, le doute lui faisait peur, ce qui le conduisait à plus de doute et indubitablement à plus de peur. Le doute est présent partout dans l'esprit d'Alex. Il peut douter de lui même, ce qui est d'ailleurs la caractéristique du doute étant la plus significative chez lui. Cela l'entraine inéluctablement à douter de sa loyauté, de son courage ou de ses aptitudes et il sera enclin à en faire plus, mais d'un œil extérieur, il en fera beaucoup trop. Il aura tendance à étouffer ses amis qui et ses proches qui prendront des distances avec lui est de ce fait, ils seront en danger par sa faute. A vouloir les protéger, il les mettra en danger. Aucune logique d'avoir cette peur de prime abord, non? Et pourtant, vous voyez bien à quel point tout se tient dans l'esprit malade de notre pauvre ami si touché par ses phobies.

Sylvia qui comptait tant pour Alex, fut d'ailleurs l'objet de sa peur, mais de la part d'Alex. Il avait monté le club et demandait de l'aide à Sylvia mais sans qu'elle en fasse parti. Il voulait par tous les moyens, la tenir le plus loin possible de tout danger. Mais ayant agit ainsi avec son amie, elle avait mal prit cette marque d'attention. Un peu trop de susceptibilité et Sylvia avait fait la tête à Alex. Etant, de ce fait, loin de lui, elle était en danger parce qu'il ne pouvait plus veiller sur elle. Lorsqu'il fut ressorti de la Salle du Risèd, à demi mort dans le couloir du septième étage, Alex s'était promis de ne plus jamais prendre le moindre risque d'éloigner Sylvia Stender de lui. Voici également une raison de ses doutes quant à ses sentiments véritable sur la jeune fille. Il savait bien qu'il était trop proche d'elle pour être un simple ami, mais un amour fraternel peut être confondu avec un véritable amour si l'on n'est pas en pleine possession de ses facultés. Et comme Alex était en permanence troublé par le doute, il ne savait pas ce qu'il ressentait vraiment. Si Saya ne le troublait pas, il aurait vu qu'il ressentait des sentiments très fort mais qu'il n'était pas amoureux de la blondinette, mais en cette époque de doute intense, Alex ne savait plus rien.

Sylvia d'ailleurs, semblait complètement perdue elle aussi. Alex ne la connaissait pas pour perdre ses moyens de la sorte, mais sachant très bien ce qu'il se passait, là il ne doutait pas (aussi curieux que cela puisse paraitre). Sylvia était passé par des visages très différents depuis quelques phrases, et Alex ne chercha pas plus loin. Pour ça, il savait que c'était le doute de ses propres phobies qui tourmentaient son amie. Il ne chercha donc pas plus loin et dit à son amie:

-Sylvia, je suis d'accord avec toi. Je ne pensais pas à ça lorsque je recrutais de nouveaux élèves, mais en fait, beaucoup semblent avoir peur de toute cette histoire... Trop peur pour combattre comme nous le faisons en tout cas. C'est drôle que tu parles du club, je me disais justement que le Risèd Squad ne servait pas vraiment à grand chose finalement. j'aurais mieux fais de me casser une "guitare" le jour où je l'ai fais ce maudit club pensa-t-il. Je ne dis pas que je veux à nouveau le dissoudre même si c'est ce que je pense en fait, mais en regardant de plus loin, il a apporté beaucoup de problèmes et de risques inutiles. Cela dit, de le reformer comme avant pourrait être une bonne chose. Comme tu m'en as fais la suggestion, ce serait très bien.

Alex n'avait que très peu repris son souffle, aussi ce dernier était plutôt court. Il se mit à réfléchir intensément à tout ceci et là, une phrase de Sylvia lui revint à l'esprit. Celle à laquelle il répondit simplement:

-Sans toi Sylvia? Très simple: je serais mort, j'aurais abandonné, je ne serais pas allé me soigner à Ste Mangouste, je ne serais pas revenu à Poudlard... Je continue? Tu es bien plus que ce que tu peux paraitre en ce qui me concerne. Même lorsque je ne pouvais pas être à tes côtés, tu étais une grande partie de ma force lorsque j'étais à Ste Mangouste et tu es le moteur de ma volonté à me battre aujourd'hui. Notre combat, j'y met cœur et âme pour moi, pour les élèves et professeurs, pour Poudlard, mais aussi et surtout pour toi. Dans les rares amis que j'ai, tu es la plus fidèle, la plus protectrice, la plus pédagogique et celle qui m'a sauvé la vie. Pour tout ça, je ferai beaucoup. Tu es mon amie quoi, une véritable amie. Mais ça, tu dois déjà le savoir. Enfin bref! Je m'égare un peu là...

...Il s'égarait? Pas vraiment en fait. Ayant vu que Sylvia était sujette au doute, il voulait lui rappeler certains évènement forts pour qu'elle soit touchée d'une manière ou d'une autre. Il fallait qu'elle se vide l'esprit de toutes ces questions qui n'allaient pas tarder à venir en masse dans sa tête. Même si elle était très intelligente, elle ne pouvait pas braver cela bien longtemps. Personne ne le pouvait de toute manière. Il attendit alors que la jeune fille revienne un peu plus à elle.

Un léger temps passa, puis Alex suivit le conseil de la jeune fille. Il retourna s'assoir sur la seconde marche des escaliers menant à la grande salle, mit sa tête dans les mains (le front sur ses paumes) puis il respira longuement et profondément. Il se clamait peu à peu puis il regarda son amie dans les yeux depuis son assise. Il la regardait mais ne dit plus rien. Il attendait que la blondinette réagisse. En abondant dans le sens d'Alex? En opposition au Gryffondor? Vous le saurez en suivant cette aventure.

Apparemment, Alex n'avait pas eu pour projet de remettre sur pied le club. D'ailleurs, il avoua même avoir envie de le dissoudre, chose que Sylvia trouva absolument idiote. Mais venant de son Gryffondor d'ami, cela n'avait rien d'étonnant. Un sourire amusé passa alors sur son visage.

"Dissoudre le seul groupe de personnes qui a jamais essayé de faire quoique ce soit pour mettre fin à toute cette mascarade est de loin la plus stupide idée que tu n'aies jamais eu !" s'exclama-t-elle avec un petit rire moqueur. "Réfléchis un peu Alex. La plupart des écervelés de l'école rêvent de conquête du monde de la Magie, d'aventures à la Harry Potter, et j'en passe. Un club, ça leur donne l'impression d'une nouvelle armée de Dumbledore. C'est la seule chose que les ronfleurs du cours d'Histoire de la Magie ont jamais retenu. Alors ce club, il sera refondé. Mais avec des gens en qui l'ont peut avoir confiance." déclara-t-elle en guise de conclusion.

S'adressant toujours avec une certaine autorité, Sylvia ne doutait pas de l'impact de ses mots. D'ailleurs, douter n'était pas un mot qui faisait partie de son vocabulaire. Ou du moins, de son vocabulaire quotidien, car il fallait bien admettre que cette peur lancée par Saya avait de l'emprise sur tout le monde, elle y compris.

Une pensée sembla traverser la tête de Alex. Comme une boutade, Sylvia lui avait suggéré qu'il ne ferait pas grand chose sans elle. Tout le monde n'étant pas aussi prompt à réagir que Sylvia, c'est ce moment-ci qu'Alex choisit pour lui le confirmer. Chose dont Sylvia, une fois de plus, ne doutait absolument pas. Mais Alex se lança dans bien plus qu'une simple approbation. Son petit monologue mit d'ailleurs Sylvia mal à l'aise, bien qu'elle n'en laissa rien transparaître.Si Sylvia avait bien horreur d'une chose, les Serpentards mis à part, c'était les débordements d'affections. Clémentine Zinerth, son amie de Serdaigle, le savait d'ailleurs très bien. Ce qui ne l'empêchait pas de l'écraser entre ses bras de temps en autre, histoire de déranger Sylvia.

La blondinette écouta donc d'une oreille distraite le discours de Alex, puis le conclut par une phrase :

"Oui, je sais. ça fait le même effet à beaucoup de personnes."

Sylvia regarda alors sa montre. Un cadeau de sa mère. Il se faisait tard. Le couvre-feu n'allait pas tarder à tomber.

"Bon, il est temps de filer dans nos salles communes respectives si nous ne voulons pas tomber nez à nez avec Rusard ou Miss Teigne." déclara-t-elle en montant les escaliers.

Sylvia, qui avait déjà monté deux marches en direction de l'étage supérieur, fut arrêtée par de nouvelles paroles d'Alex. Elle leva les yeux au ciel, soupira, puis se retourna non sans cacher ses précédentes mimiques faciales. Certes, cela aurait pu blesser son ami. Mais se retourner avec un large sourire aurait été hypocrite. Sylvia avait eu sa dose pour ce soir, et elle voulait rentrer se coucher avant que le couvre-feu soit sonné. Elle jeta un rapide coup d'oeil à sa montre, croisa les bras, et écouta attentivement Alex.

Son ami avait peur d'encourager des élèves malintentionnés avec le club. Sylvia fit la moue. Certes, cela pouvait toujours arriver. Mais le club réfléchissait et agissait uniquement dans le but de contrer Saya Serpentard. Elle ne voyait pas comment un ennemi de Poudlard ou un allié de Saya - si tant est qu'elle en est eu - aurait tiré profit du club. Sylvia le laissa cependant terminer, sans le couper, avant de lui répondre.

"Alex, tu es bien gentil de te préoccuper de tout cela, mais je ne vois pas comment on pourrait nous mettre des bâtons dans les roues. Personne n'aime voir sa peur se matérialiser; Alors ça m'étonnerait que quelqu'un se rallie à la cause de Saya Serpentard", lança-t-elle comme une boutade. "Et quand bien même un illustre écervelé le ferait, que pourrait-on lui apporter que Saya ne sait pas déjà ? Pas grand chose. Alors, sincèrement, ne t'inquiète pas pour ça. Et puis, il faut parfois savoir choisir entre ce qui pourrait tourner mal et ce qui va tourner mal."

Sylvia marqua une pause, fort fière de sa dernière phrase. N'étant pas sûre qu'Alex comprendrait ce dont elle voulait parler - on n'est jamais sûre de rien avec un Gryffondor - elle ajouta :

"En l’occurrence, c'est ne rien faire qui entraînera forcément la situation dans des abysses colossales" fit-elle d'un ton supérieur.

Sylvia regarda une nouvelle fois sa montre. Il était grand temps d'y aller. Lorsque Sylvia releva la tête, Alex lui affirma avec courage que tout allait bien se passer. Sylvia ne put s'empêcher un petit rire.

"Epargne-moi ce genre de phrase Alex, c'est vraiment trop risible", dit-elle en réprimant un rire. "Allez, bonne soirée le Gryffondor."

Sur ces mots, Sylvia tourna les talons.