Ne plus se promener dans le château une fois la nuit tombée... autant dire à une chèvre de rester attachée à son piquet. Wil' n'était pas une chèvre, un mouton qui suivait les autres et obeissait docilement. Il n'était pas un rebel, mais un solitaire. Il n'était pas un pion, et n'avait aucune intention de se mettre à genoux si les règles ne lui convenaient pas. C'est en partie pour cela qu'il s'était glissé dans le parc, une fois tous les élèves sagement couchés. Le jeune garçon, de plus, n'arrivait de toutes façons pas à trouver le sommeil. Il arpentait les alentours du château comme un animal sauvage, comme une ombre fuyante que l'on n'apperçois qu'une seule fois. Wil' avait réajusté sa longue echarpe et fourra son nez dedant, les mains dans les poches et le regard rivé vers les étoiles. Plafont scintillant proprement ridicule... il n'arrivait pas à comprendre pourquoi ces petits points clignotants provoquaient chez certains une adoration débordante. Lui ne les aimait pas. Parvenu à l'orée de la Forêt Interdite, le jeune garçon ralentit le pas. Un bruissement, quelques paroles floues... Wil' n'était plus seul. Avec des gestes lents, il retira ses mains de ses poches et s'empara de sa baguette. Soudain, une personne surgit de derrière une rangée d'arbre, sa silhouette nette se decoupant dans la nuit tel une ombre chinoise. Le jeune garçon fit un pas en avant et se redressa. Impossible de savoir de qui il s'agissait. D'une voix portée, Wil' lança:

- Hé toi !

Wil' s'approcha encore d'un pas, mais stoppa net lorsque, dans un rayon de Lune, lui apparut le visage de la jeune Serpy. Cette Serpy qu'il avait battu en duel sur le terrain de Quidditch, la veille au soir. A la lueur de la pâle lumière, se decoupait très nettement la cicatrice de la jeune fille, traversant sa joue sur une bonne longueur. Wil' baissa legerement sa baguette. Aucune expression sur son visage, ni surprise, ni repentissement. La gamine Serpy' lui demanda ce qu'il pouvait bien faire ici, et souligna que l'accès à la Forêt Interdite était totalement interdit. Wil' resta immobile, le souffle silencieux. Seul un léger haussement de sourcils de sa part prouvait qu'il n'était pas fait de marbre. D'une voix traînante, Wil' lacha d'un air dedaigneux:

- Naaan, tu plaisantes là...

Puis son regard se posa sur l'une des mains de la jeune fille. Qu'est-ce qui avait bien pu la pousser à venir jusqu'ici, dans un endroit aussi dangeureux que la Forêt Interdite ? Surement une bonne raison. Ou très mauvaise. Louche, peut-être. Secrète, très certainement. Wil' pointa sa baguette en direction de la Serpy. En direction de ses poches, plus precisement. Elle planquait quelque chose. Quelque chose de bizarre.

- Tu planques quoi ? Une chose qui te permettra de dominer le monde c'est ça ?

Wil' vit la jeune Serpy effleurer distraitement la cicatrice qu'il lui avait infligé. Il est vrai que le jeune garçon n'appreciait guère que l'on vienne l'embêter volontairement sur un terrain où il désirait être seul. La gamine l'avait cherché. Marquer physiquement à vie une jeune fille d'une vilaine balafre, relevait du crime le plus terrible. Wil' le savait. Très tôt, on lui avait appris à ne pas frapper les filles. Il opinait du chef, et respectait la consigne, preferant se faire les griffes et les dents sur les garçons de son àge. Mais cette Serpy l'avait provoqué, n'avait eu ce qu'elle mériait. Elle n'optiendrait qu'une balafre, pas deux. Wil' emit un rire jaune à peine audible. La gamine semblait mal à l'aise tout à coup.

- Parce que toi tu as l'exclusivité de pouvoir déambuler librement dans la Forêt, n'est-ce pas... J'aurais dû m'en douter.

Les rumeurs couraient toujours sur la Salle du Risèd et les cauchemards qu'elle lancait sans cesse dans le château. Certains élèves avaient même eu la frousse de revenir à Poudlard pour la rentrée, de peur de voir surgir leurs pires cauchemards juste devant leur nez. La "Salle" que venait de citer la jeune Serpy était celle du Risèd. Wilbur en aurait mis sa main à couper. D'une démarche lente et nonchalente, la tête legerement penchée sur le côté et le visage morne, le jeune garçon s'avanca vers la Serpentarde.

- A refermer ? De qui te moques-tu... Si tu voulais la refermer cette Salle, tu ne viendrais pas roder toute seule ici en plein milieu de la nuit. Tu serais avec la directrice, des professeurs, ou avec d'autres élèves. Me prends pas pour un crétin ! Et puis qu'est-ce que tu veux dire par " on reverra ça une autre fois " ? T'avais l'intention de me revoir ?

Wilbur était bavard. Lui qui d'habitude était pratiquement muet. Dans certains moments, sa langue pouvait se délier. En particulier face à des personnes masquants de nombreux secrets. Wil' releva legerement sa baguette vers la Serpy et la regarda d'un air dur et glacial.

Wilbur ne se serait pas attendu à une autre remarque de la part de la Serpy. Chouette, il connaissait son nom... Aranya Exhumeï. Aranya, qui semblait tisser sa toile de secret en secret, de mystère en bizarrerie, de mensonge en silence. Elle taisait quelque chose de louche. Non pas que Wil' eut envie de se glisser dans des affaires qui ne le l'interessaient pas. Mais tout de même, cette histoire l'intriguait. Aranya ne s'était pas trouvée ici par hasard cette nuit. La jeune fille désirait se venger de lui, c'était evident. Elle ne le cachait pas. Sans une once de chaleur dans la voix, le jeune garçon répondit à voix basse et rauque:

- Ravis de constater que tu parles de toi à la troisième personne... Ton égo doit être surdimensionné dis-moi.

Le jeune garçon vit Aranya s'approcher lentement de lui. Elle placa son visage à quelques centimêtres du sien. Wil' resta totalement immobile, mis à part qu'il releva legerement le menton d'un air quelque peu méfiant. La jeune fille lui deconseillait de se placer en travers de son chemin. Ce qui donna la vive envie à Wil' de lui mettre des batons dans les roues, de d'immiscer dans sa vie pour la faire pourrir... juste un peu. Un embryon de sourire éclot sur ses lèvres tandis qu'il plongea son regard dans celui de la Serpy.

- Tiens donc... Tu me demandes de ne pas t'embêter. Serais-je un ennemi potentiel ? Ne me dis pas que tu as peur de moi. Une personne de ton importance, tout de même ! Rassures-toi gamine, je n'ais aucune envie de me rapprocher de ta sordide existence. Moi aussi je " travaille " seul.

Wilbur vit Aranya reculer, puis tourner les talons en lancant une ultime parade verbale. Le jeune garçon laissa retomber son bras le long de son corps, et décida de ranger sa baguette. A voix basse, il murmurra.

- Au contraire, je crois ne trop bien savoir qui tu es...

Toujours pleine de ressentiment, d'autoconsideration et de ce je-ne-sais-quoi qu'elle n'arrivait pas à apprehender et qui la rendait tantôt furieuse, tantôt agacée, elle l'entendit marmonner dans son dos. Elle serra sa main gauche, pendant que tout lui criait en elle de prendre ses jambes à son coup, et d'attendre d'être sure de son coup pour ne pas le louper, elle se figea, ayant encore des réserve de fiel à déverser.
Je ne sais pas au juste ce que -toi- tu fiches ici, mais ça ne me plait... Tu as des choses à te reprocher. Prend garde que je ne te detruise de l'interieur avant de te ridiculiser en public.
Puis, elle ajouta, pleine de morgue et de virulence :
L'enfer n'est rien, à côté d'une femme bafouée. Tiens le toi pour dis.
Elle se fit deux pas à reculons et ajouta :
Je suis ton pire cauchemar. Si tu fouines, gaffe au réveil en sursaut.
Un gros "bang" retentit : ella avait lancé le lashlabask, sans se préoccuper de savoir si elle avait touché sa cible, mais à bout portant, cela laissait peu de chance d'esquive. Elle s'enfuit en courant, un sourire figé sur ses lèvres, le regard troublé.

Wilbur non plus, ne savait pas trop ni pourquoi ni comment il s'était trouvé ici, au beau milieu de la nuit. Une pulsion vaguabonde, une envie de respirer autre chose que la poussière du château, d'écouter autre chose que les ronflemments de ses charmants camarades. Le jeune garçon toisa Aranya d'un regard mauvais.

- C'est toi qui me dis ça ? Toi qui tentes - vainement - de t'approprier le terrain de Quidditch une fois la nuit tombée ? Tu t'es donnée ce mal pour rien apparement - il désigna la cicatrice d'un geste vague. Aussi, je pense plutôt que c'est toi qui possède un problème avec ta conscience.

Aranya se disait femme bafouée. Wilbur ne savait rien des femmes, encore moins des femmes bléssées. Aussi, les paroles de la jeune fille lui passèrent loin au-dessus de la tête. Elle se disait egalement être son pire cauchemard. Rien que ça, vraiment... Si seulement elle savait. Si seulement elle savait à quoi ressemblaient ses cauchemards, à lui. Wil' fut amusé par cette reflexion. Aussi, distrait, ne vit-il pas le sort lançé par Aranya. Des étincelles jaillirent de la baguette de la Serpy. Des étincelles bouillantes qui explosèrent tout près de Wil' et lui brûlèrent les mains et le visage. Surpris, le jeune garçon fit un bond en arrière, secouant sa tête et ses bras pour faire tomber les braises. Puis, empris d'une hargne vive et violente, Wil' s'elanca en avant, et vint attraper le col d'Aranya, en pointant le bout de sa baguette dans le creux de son cou. Son regard bouillant se planta dans le sien comme un harpon.

- Espèce de lâche ! Non seulement tu espères me faire mal, mais en plus tu t'y prends comme quelqu'un qui n'a jamais appris pas se battre en duel. Tu ne mérites même pas d'être mon pire cauchemard ! Crois-moi la prochaine fois que tu tentes quoi que ce soit contre moi, ce n'est pas avec une simple balafre que je te laisserai... mais avec un oeil en moins.

Wilbur laissa passer un court silence, tenant fermement le col d'Aranya dans sa main gauche, et sa baguette dans la main droite. Puis, avec autant d'attention que s'il jetait un détritus, le garçon lacha la Serpy. Il resterait sur ses gardes. Jusqu'à ce qu'elle s'en aille.

Wilbur recula de quelques pas, au cas où un nouveau duel exploserait. Il tenait toujours sa baguette avec fermeté, et son attention était entièrement braquée sur Aranya. Le ciel aurait pu lui tomber sur la tête qu'il ne l'aurait même pas sentit, tant il se concentrait sur chaque mouvement, chaque expression de la Serpy. Celle-ci se massa le cou, et perdit quelque peu de sa superbe en bafouillant des menaces puériles et bien faibles. Wilbur secoua lentement la tête, comme s'il était navré pour elle de la voir en si mauvaise posture. Il sentit que la partie était finie pour ce soir. Mais qu'il faudrait desormais rester prudent, partout et tout le temps. Il allait forcement recroiser Aranya dans les temps à venir. Elle était dans la même maison que lui, même s'il refusait d'être un Serpentard. Wil' leva un sourcil interrogateur face à la remarque d'Aranya.

- Encore une fois tu m'imagines bête... Ma pauvre Aranya, si tu avais des côtes cassées tu n'aurais même plus la force de parler. Tu te roulerais par terre de douleur. Or tu n'as pas l'air de beaucoup souffrir, je me trompe ?

Wil' baissa son bras. Il voulait qu'Aranya parte la première. Du côté opposé où, lui, rentrerait dans le château. Le jeune garçon remit distraitement une mèche de ses cheveux ebènes derrière son oreille.

- Je vais rester encore un peu ici. Toi, va t'en. Je ne vais pas t'embêter plus longtemps ! Pars faire ce que tu as à faire de macabre, louche où je n'sais quoi encore de tordu... Au contraire de toi, je ne frappe jamais dans le dos.

Wilbur s'étonna de voir Aranya tourner les talons et disparaître, sans rien lui cracher au visage, sans lui envoyer de morale ou de reflexion quelle qu'elle soit en pleine figure. Le jeune garçon aurait pu s'en amuser. Seulement le fait qu'Aranya ait saisi sa chance de s'éloigner sans rechigner confirmait bien que sa venue dans la Forêt Interdite avait été l'origine d'une chose importante. Si Aranya n'avait rien eut d'autre à faire, elle aurait tenu tête à Wilbur, au moins jusqu'à l'aube, dans l'espoir puéril de posséder le dernier mot. Cependant, la jeune Serpy s'était evaporée. Sans piper mot. Wilbur resta un instant à la regarder s'eloigner, se muer dans les tenèbres d'où elle était certainement venue.

* C'est ça... Cours et saute et danse, petite. Mais sache que desormais je garderai un oeil sur toi. Que tu le veuilles ou non. Tu ne sera pas gagnante dans ce combat. *

Si Poudlard était en danger, Wilbur ne s'en souciait pas, ou très peu. Il ne connaissait pas encore assez bien l'école pour s'y être attaché. Remarque... s'il avait connu Poudlard mille ans auparavant, le jeune garçon n'en aurait pas été plus affecté non plus... Mais il désirait percer le secret d'Aranya, rien que pour la mettre à genoux, lui faire voir qui était le plus habile des deux. Wilbur parti dans le sens opposé de la jeune fille, en se faisant la promesse d'y parvenir un jour.

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